dimanche 8 décembre 2019

Les îles du Salut - fin

Après le repas pris sous forme de buffet, nous rejoignons notre chambre pour nous reposer un peu au moment des heures chaudes puis nous repartons à la découverte de l'île et profiter de l'air marin. C'est très agréable de voir enfin une mer digne de ce nom même si l'eau n'est pas cristalline. Nous apercevons notre première tortue verte. Il faut être patient car elles disparaissent aussi vite qu'elles arrivent mais comme nous avons le temps nous nous asseyons à l'ombre des palmiers sur des rochers et profitons du spectacle offert par les tortues qui se sont habituées à notre présence. Après ce beau moment de tranquillité nous poursuivons nos pérégrinations et remontons progressivement vers le plateau.

Toujours des murs de pierre ou des petites constructions comme celle ci-dessous qui était la morgue de l'île ou étaient entreposés les corps des bagnards décédés avant d'être jetés à la mer. Quelques mètres plus loin le cimetière des enfants. Pas ceux des bagnards bien sûr mais ceux des gardiens car ici sur Royale l'administration pénitentiaire a autorisé la venue des familles, le climat insulaire était beaucoup plus supportable que sur le continent. Malgré cela peu d'enfants ont atteint leur majorité. Une curiosité dans ce cimetière nous a été livrée par le guide hier et je pense que nous ne l'aurions pas vue par nous-même.

Une tombe attire notre attention car les dates laissent facilement deviner qu'il ne s'agit pas d'un enfant : 1904-1938, il s'agit de la sépulture d'une femme, Elise Echard qui obtint l'autorisation exceptionnelle de pouvoir être enterrée auprès de ses 2 enfants.


La balade se poursuit et bientôt des singes capucins font leur apparition juste au-dessus de nos têtes. Ils ne sont pas farouches et se laissent observer et photographier. Il y en a même un qui se démène comme un beau diable pour récupérer une noix de coco qu'il épluche à grands coups de dent.

Arrivés sur le plateau, nous repassons devant le phare construit en 1864 et dont le gardien était évidemment un bagnard, mécanicien. Juste à côté une très belle construction en pierre de taille de latérite, l'hôpital militaire, totalement réservé au personnel du bagne mais aussi aux notables de Cayenne qui pouvaient y trouver qualité des soins et grand air. Quant à l'hôpital des bagnards, tenu par des religieuses, il est aujourd'hui détruit. C'était un havre de paix pour qui avait la chance d'y être accepté mais attention aux simulateurs, "doublement de la peine garantie" !


Pour les plus intrépides, une ancienne salle du bagne dont j'ignore l'usage, est mise à disposition moyennant quelques euros pour y installer son hamac, prévoir de la corde car c'est très large.
Nous traversons le plateau vers le nord pour rejoindre le quartier pénitentiaire. Avant l'arrivée du hamac, autorisé en 1929, le couchage était constitué d'une planche de bois appelée bas-flanc. Même si l'ensemble n'est pas en parfait état on imagine bien les conditions de vie tout en étant sûrement encore loin du compte.
Au niveau des cellules disciplinaires c'est 34 cachots sombres, totalement obscurs, et 32 cachots dits clairs qui nous attendent. Ils étaient réservés aux bagnards les plus durs et les condamnés à mort. Sur les murs des dessins témoignent du passage de ces hommes dont certains ont passé des années dans ces cellules. Oui des années ! Et quant au régime alimentaire, du pain sec, de l'eau et une soupe tous les trois jours. Enfin, au moment du couchage, les chevilles du bagnard étaient emprisonnées par une boucle métallique, il y a mieux comme confort.





Nous quittons ces espaces clos non sans passer devant les 4 plots qui supportaient la Louisette, le Grand rasoir national, le Moulin à silence, en clair la guillotine. Nous nous trouvons ensuite au niveau du quartier des surveillants et de leurs familles. Demeures réservées aux gardiens mariés, ces petites maisons sont bien conservées et servent aujourd'hui d'hébergement aux touristes. Les enfants pouvaient bénéficier d'une école tenue aussi par des religieuses. Cette promenade historique sur l'île Royale se termine ainsi et nous allons maintenant profiter d'un moment de très grande sérénité puisque tous les touristes ont quasiment rejoint le continent et nous serons 8 personnes à profiter du buffet du soir. 


Coucher de bonne heure, réveil de bonne heure ! Petit déjeuner très agréable avec vue sur l'île du Diable ! Nous avons toute notre matinée pour nous promener, fouler de nouveau le sentier littoral et surtout nous baigner dans la piscine des bagnards. La marée est favorable ce qui va nous permettre de profiter une bonne heure de cet endroit atypique. C'est vraiment très agréable et la vue depuis l'intérieur est exceptionnelle, entre cocotiers et île du Diable.




Nous retournons faire nos sacs car le catamaran nous récupère à midi pour un pique-nique sur l'eau avant de rejoindre l'île Saint Joseph.







En chemin nous ne pouvons manquer de repasser voir la piscine. Nous avons bien fait d'en profiter à la bonne marée car maintenant tous les cailloux apparaissent.


Le pique-nique sur la catamaran est sympa et nous avons une heure à notre disposition pour déjeuner et profiter de la mer ce que je fais bien évidemment. Elle est un peu fraîche mais c'est très agréable. Puisque nous y sommes, nous rejoignons Saint Joseph à la nage avec d'autres touristes, ce qui nous prend 10 minutes tranquillement tandis que le skipper nous amène quelques affaires en utilisant son annexe. Nous disposons de 3 heures pour faire le tour de l'île et visiter les bâtiments du camp de transportation. 


Cette île a aussi sa piscine mais elle fait beaucoup plus vaseuse. Pour cette fois nous n'en profiterons pas et vous comprendrez pourquoi ! Nous commençons la balade et le côté plus sauvage de ce troisième îlot saute aux yeux. La vue sur l'océan est infinie et les vagues se fracassent avec force sur les rochers. 







De véritables cartes postales s'offrent à nous tout au long de cette promenade qui nous rapproche peu à peu d'un premier lieu plein d'histoire, le cimetière des surveillants et autres personnels comme les médecins et les religieuses. Aujourd'hui c'est la Légion Étrangère qui entretient cet endroit. Encore quelques mètres et nous atteignons la seule plage de l'archipel uniquement accessible à marée haute. Elle est recouverte de débris de coquillages que l'on utilisait pour fabriquer la chaux.





Nous empruntons maintenant un sentier entièrement pavé qui va nous conduire au sommet de Saint Joseph où se trouve le quartier des bagnards. Il accueillera d'abord des opposants politiques puis les condamnés les plus récalcitrants, les "incorrigibles", comme Paul Roussenq, surnommé le "roi du cachot". Il va y passer 10 années sur 14. Les conditions de réclusion sont terribles et les forçats sont tenus au silence absolu. Tout bruit, même celui des chaînes, entraînait la prolongation de séjour. Aujourd'hui les bâtiments sont à l'abandon et la nature reprend petit à petit du terrain. Nous déambulons de longues minutes au milieu de ce véritable labyrinthe de couloirs, de cours et de cellules. Nous nous asseyons ensuite à l'extérieur à l'ombre d'un grand manguier car nous avons du temps devant nous avant de rejoindre le catamaran. Il n'y a personne et seul le bruit des oiseaux et du vent dans la cime des arbres trouble le silence qui règne sur le sommet de cette île. Comme il y a encore moins de 80 ans...






Il est 16 h lorsque nous rembarquons sur le catamaran non sans avoir encore profité une dernière fois de la mer. La voile est sortie mais le vent reste insuffisant aussi rentrons nous aussi au moteur. Des oiseaux nous accompagnent et cet archipel du Salut disparaît peu à peu sous l'horizon. Nous y avons passé un très bon moment et c'est un lieu d'histoire à faire absolument.





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