dimanche 1 décembre 2019

Les îles du Salut - 2° partie

Il est 10 h et le catamaran viendra nous rechercher demain vers 12 h pour la suite de la découverte de cet archipel. Chargés de nos bagages, nous entamons l'ascension des 40 mètres de dénivelée qui nous séparent de l'auberge située sur le plateau qui domine l'île Royale ce qui en a fait un formidable poste d'observation. Ce bâtiment d'hébergement fut autrefois le mess des officiers et des surveillants. C'est là que nous passerons la nuit. Après une bonne suée, nous obtenons les clés de notre future chambre ventilée que nous investissons rapidement pour y trouver un peu de fraîcheur et nous découvrons alors la superbe vue obtenue depuis notre terrasse : l'île du Diable. Le séjour commence bien.


Une visite guidée est prévue vers 10 h 30 et nous allons y participer afin de prendre plus facilement connaissance avec tout cet environnement historique. En nous promenant juste à côté de notre hébergement nous tombons nez à nez avec nos premiers agoutis. On ne le sait pas encore mais il y en a plein l'île et nous aurons alors le loisir d'en rencontrer de très nombreux autres.


Notre guide, passionné d'histoire, est au rendez-vous et commence par 30 minutes de présentation des îles du Salut et de l'histoire du bagne de Guyane. Nous apprenons que de nombreuses traces de polissoirs au nord de l'île prouvent la présence d'amérindiens qui appelaient cet archipel les "îles du triangle". Elles furent rebaptisées "devil's islands" ou îles du diable au XVII° siècle par les premiers explorateurs qui se heurtèrent à la dangerosité de la côte et à la violence des courants. Enfin on ne peut évoquer ce triangle d'îles sans parler de l'expédition de Kourou de 1764.

Extrait du Guide Guyane de philippe Boré :
A l'issue de la guerre de Sept Ans contre l'Angleterre, la France perd de nombreuses colonies ; le duc de Choiseul choisit la Guyane comme "plate-forme de la reconquête de la suprématie française". En 1764, 12 000 européens arrivent pour mettre en valeur des terres françaises. Non préparée à affronter une traversée de l'Atlantique, accueillie dans des conditions déplorables, abandonnée sur des terres mal drainées à l'embouchure du Kourou plus de la moitié des arrivants va périr. Les autres sont rapatriés ou vont échapper aux maladies, en se réfugiant aux "îles du Diable", renommées à cette occasion "îles du Salut", car elles étaient le salut de la colonie. La plus vaste des îles devint île Royale en l'honneur du roi, Saint Joseph parce que l'expédition était placée sous la protection de ce saint, la dernière conserva son nom d'origine. Cet échec retentissant de colonisation de la Guyane fut à l'origine, dans l'esprit des Européens, de la mauvaise réputation de la Guyane.


Il est temps maintenant de procéder à la visite proprement dite et nous nous dirigeons vers le premier monument important, l'église. Nous passons auparavant devant une ancienne carrière creusée dans la roche par les bagnards pour extraire les moellons nécessaires à la construction des bâtiments. Cette fosse deviendra ensuite un réservoir d'eau douce en saison des pluies et abritera jusqu'à il y a peu un gros caïman qui y fut mis pour atténuer l'impact de toutes les grenouilles qui s'y étaient installées.

Le plateau est arboré est nous passons sous des arbres centenaires. Le guide attire alors notre attention sur des branches hauts perchées et après une petite accommodation nous finissons par apercevoir les magnifiques couleurs éclatantes du plumage d'un ara bleu. 


Après cet intermède animalier, nous atteignons la chapelle qui date de 1855 non sans être passés devant l'ancien presbytère qui abrite aujourd'hui la gendarmerie de l'île et ses 2 gendarmes. Construite en blocs de latérite taillés, cette chapelle est parfaitement entretenue et grâce à la présence du guide nous pouvons visiter l'intérieur.

Elle est richement colorée et il y a de nombreuses œuvres picturales. Ces œuvres ont été peintes par le bagnard et faussaire Francis Lagrange, dit Flag. Ces fresques sont des scènes bibliques qui renferment, pour l'époque, de courageuses pointes d'humour.

Ci-dessous par exemple on peut apercevoir le plus jeune détenu en Enfant Jésus, la Vierge offrant des pommes, le fruit défendu.


Ou Seznec, autre célèbre bagnard, sous les traits d'un pêcheur...

Nous poursuivons le tour de ce plateau et dans une cour il reste un lavoir en pierre ou il ne faisait pas bon passer le dernier. La faune est aussi présente et un singe profite d'une accalmie pour ramasser un fruit tombé au sol. Partout des murs d'enceinte et une végétation luxuriante qui regagne du terrain. Un sentier fait le tour de l'île et nous permet de profiter de très beaux paysages et surtout de la fraîcheur relative d'une brise marine.








Il faut environ une heure pour faire le tour de Royale et nous accédons ainsi à la fameuse piscine des bagnards. Ouvrage de maçonnerie et de rochers, sa conception permet de se prémunir de la houle et des requins. On attribue d'ailleurs cette prolifération de squales au fait que les détenus décédés finissaient jetés à la mer mais également à la présence d'un abattoir dont le sang des animaux se déversait directement dans les eaux agités du chenal. La baignade était une des rares occasions de se laver et de se détendre. En ce qui nous concerne nous profiterons de ce bel endroit demain lorsque la marée sera plus favorable. Pour l'instant il est temps de rejoindre le restaurant pour un repas bien mérité.



4 commentaires:

  1. Belles expéditions 👍. Je ne m attendais pas à autant d histoire ! Paradis photographique

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    1. Et il me reste encore un dernier épisode à écrire sur ce sujet...

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  2. Comme d'habitude, belle histoire agrémentée de superbes photos (faune, végétation et architecture).

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  3. Coucou les amis
    C'est un lieu plein d'histoires et finalement mal connu. Quand on creuse on pourrait écrire un roman rien que sur cet endroit. Nous y retournerons et nous pourrons alors évoquer d'autres sujets.
    Merci pour votre commentaire qui nous conforte dans l'intérêt de décrire notre "aventure" guyanaise
    Bises à vous

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