samedi 23 novembre 2019

Roura et les fourmis

Après notre balade en pirogue, nous sommes passés par le village de Roura pour admirer son église située au bord du fleuve. Comme il est dit dans les guides, cette commune est un havre de paix et peut servir de point de départ à de nombreuses visites. Après la crique Gabriel nous pourrons envisager plus tard, le lac Pali, les cascades de Fourgassié, voir les ibis et le fleuve Mahury.

La rivière Oyack servit de refuge, au début du XVIII° siècle, à un célèbre chef noir-marron, Gabriel, qui, à son tour a laissé son nom à l'habitation (colonie) Gabrielle puis à la crique. A la tête d'un mouvement d'évasion en 1712, il échappe à ses poursuivants en se réfugiant dans les marais où il périt noyé.

Nous cheminons une quinzaine de minutes entre fleuve et église lorsque je suis attiré par un spectacle haut en couleurs à l’échelle macroscopique. A vous d'en profiter...








mercredi 20 novembre 2019

La crique Gabriel

Que faire un dimanche matin si on dispose de quelques heures ?

Un tour en pirogue sur la crique Gabriel. Pour cela on se dirige vers Roura, petite commune située sur la rive droite de la rivière Oyak, à 10 km en amont du port de Degrad-des-Cannes par le fleuve Mahury et par la route à 27 km de Cayenne en direction de Régina.

De Roura on cherche Wayki village, restaurant et loueur de pirogue avec guide, situé au bord de la crique Gabriel.

On embarque sur une longue pirogue et on se laisse guider pendant 3 heures en aller-retour au milieu d'une forêt très dense et caractéristique d'un environnement amazonien. Ici la forêt est dite ripicole car à l'interface entre milieu terrestre et aquatique.

Dès le départ le guide nous présente le Moucou-Moucou, plante particulièrement envahissante et dont on se souviendra longtemps du nom car il y en a vraiment beaucoup-beaucoup !

Ce qui caractérise aussi cette balade c'est la découverte de trois paysages, la forêt précitée, le fleuve et les marais. Aujourd'hui nous ne verrons qu'un petit morceau du marais aux portes de la réserve de Kaw, mais prochainement nous y ferons une excursion spécifique.

En fonction des saisons, le paysage change et les Morphos, papillons emblématiques, fréquentent normalement cet endroit mais aujourd'hui seuls 2 représentants au bleu électrique oseront voleter au-dessus de nos têtes. Ce n'est que partie remise !

Canne à sucre, café et cacao furent pendant longtemps des produits phare à partir des années 1730 ce qui explique la présence de belles cabosses notamment.

Une termitière s'est bâtie de façon très classique sur un arbre qui se penche au-dessus de nous rendant ainsi l'accès à la colonie très facile. Le guide en extrait quelques habitants et nous explique leur bienfait nutritif car possédant le meilleur ratio poids protéine... à condition aussi d'en manger de très très grandes quantités. Mais pour l'instant, nous allons en déguster une seule que nous saisirons tranquillement après avoir humidifié un doigt. Goût de terre ou de bois avant tout, pas désagréable !
Nous continuons nos découvertes et passons sous un palmier Pinot qui fournit un autre bienfait de la nature, la baie Wassaï, en Guyane, ou Açaï au Brésil. De sa chair pulpeuse on extrait un jus à forte valeur énergétique. Imaginez le travail !

Un singe saïmiri apparaît rapidement avant de disparaître aussi vite puis un urubu, qui reste stoïque au sommet de son arbre observant sûrement sa prochaine proie. Nous aurons aussi la chance de croiser un lézard-serpent en train de traverser le crique à la nage (voir vidéo).


 Et pour les plus curieux qu'est-ce qui se cache dans la photos ci-dessous ? A vos commentaires.

Il est temps de faire demi-tour car cette sortie en crique est sous l'influence des marées et il ne faudrait pas rester bloqué faute de profondeur. Mais nous avons confiance en notre guide qui nous ramènera tranquillement au bord du fleuve pour le traditionnel ti-punch ! 





























lundi 11 novembre 2019

Le bagne des Annamites à crique Anguille

Lors de notre sortie au zoo, nous avons emprunté le sentier du bagne des Annamites pour rejoindre une crique et profiter d'un peu de fraîcheur. Sur le parcours nous avons traversé les vestiges d'un ancien bagne qui fait l'objet de travaux de restauration. Cheminer au milieu de ces vieilles pierres et lire l'ensemble des panneaux d'informations prend une bonne heure. C'est ce que nous avons fait et en voici un résumé.

Extrait :
"Dans les années 1920, l'empire colonial français s'étend sur tous les continents. En Indochine, la contestation politique se durcit. Le parti nationaliste vietnamien, créé en 1927, est à l'origine de nombreuses émeutes. Dans la province du Tonkin, à Yen Bay, dans la nuit du 9 au 10 février 1930, des activistes s'emparent des armes de la garnison et tuent plusieurs militaires de l'armée coloniale. Une répression sanglante s'ensuit faisant des milliers de victimes. De nombreux Indochinois sont alors envoyés au pénitencier de Poulo Condor, île située à 200 km au large de Saïgon. Le gouverneur de l'Indochine, craignant un soulèvement, souhaite se débarrasser des prisonniers politiques au plus vite


Pendant ce temps à plus de 21 000 km de là, le pouvoir métropolitain décide de soustraire la partie de la Guyane qui contient l'or, le bois de rose et le balata à l'agitation politique qui règne dans la colonie. Il crée, le 6 juin 1930, un territoire autonome où le gouverneur disposerait d'une liberté d'action dans l'exploitation des ressources naturelles. Appelé "Inini", il s'étend sur près de 80 000 km2, réduisant la Guyane à une mince frange côtière.


Le gouvernement d'Indochine veut désengorger les prisons et éloigner les activistes. Celui de Guyane a besoin de main-d'oeuvre pour développer et peupler l'Inini...la voie à la déportation est ouverte pour près de 1 500 hommes. L'Indochine s'acquittera de leurs frais de transport et d'entretien le temps de leur peine".

Le sentier est très accessible et nous arrivons dans les ruines en une trentaine de minutes. Elles sont éparpillées mais de nombreux panneaux nous orientent facilement. Le premier nous intrigue, il nous montre la direction du quartier des sénégalais situé sur la colline la plus élevée. Mais que peuvent-ils bien faire dans cette histoire ?

Extrait :
"En 1928, à la suite des émeutes provoquées par la mort de Jean Galmot (député de Guyane en 1919), un détachement de 150 tirailleurs est envoyé en Guyane à la requête du gouverneur. En garnison à la caserne Loubère à Cayenne, ils sont envoyés par roulement dans chacun des établissements pénitentiaires spéciaux...à Crique-Anguille, leur rôle est identique à celui des surveillants militaires pénitentiaires : ils surveillent les prisonniers et veillent à l'exécution des travaux".

En arrivant au sommet de la pente nous apercevons les restes de ce qui constituait la cuisine. Il y a aussi des logements, un réfectoire et des latrines. Sur tout le site ces dernières sont omniprésentes sûrement grâce à leur construction robuste en pierre mais aussi parce que l'hygiène était, et est toujours, un sujet de la première importance lorsque l'on est en "manœuvre".


Nous poursuivons notre visite et passons ensuite par la partie Commandement et Administration située également sur un point haut.




Toujours des latrines mais aussi ce curieux baquet qui n'est rien d'autre que la baignoire du commandant du camp.


Quelques constructions en dur apparaissent aussi, il s'agit de fours, et il faut noter les inscriptions gravées sur certaines briques. Elles sont estampillées A.P. pour Administration Pénitentiaire. Attention à ne pas en prendre, elles sont protégées et leur prélèvement est parfaitement illégal. Nous n'en verrons pas mais il en existe aussi frappées des lettres L.M.K, initiales de l'industriel Léonce Melkior.

Nous sommes bientôt au terme de cette visite d'un autre temps et elle ne serait pas complète sans passer par la prison. Ce corps de bâtiment est actuellement en réfection mais nous pouvons approcher sans danger et ressentir les conditions de détention extrêmes subies par les déportés, entre chaleur étouffante et humidité permanente.


Extrait :
"Le bâtiment disciplinaire, la prison dans la prison, est construit pour isoler les condamnés ayant commis une faute. En 1933, le bâtiment compte 24 cellules construites en deux phases. En 1934, lors de la fermeture du camp de la Forestière situé près du Maroni, les condamnés sont transférés à Crique-Anguille et huit cellules sont ajoutées. Les blocs cellulaires, séparés par un couloir, sont en béton. Les cellules d'une surface au sol de 2m2 permettent tout jute la mise en place d'une planche escamotable qui sert de lit. Des tronçons de rails de chemin de fer sont fixés au-dessus des cellules en guise de barreaux". 




Avant de vous quitter un dernier extrait un peu technique relatif au rail de chemin de fer de type  Decauville que nous avons rencontré lors de notre randonnée. En effet pour amener tous les matériels nécessaires le plus "facile" était la mise en place d'un rail qui partait de Port-Inini sur la crique Anguille jusqu'au camp de prisonniers.

Extrait :
"La voie Decauville est un type de voie ferrée de faible écartement (de 40 à 60 centimètres). Elle est formée d'éléments métalliques, rails et traverses, démontables et transportables. La voie est aménagée le long de la piste plane et droite qui relie le camp au débarcadère. De part et d'autre de la voie, la forêt est déboisée sur 50m offrant un passage à une ligne téléphonique achevée en 1936.
La voie ferrée franchit des cours d'eau au moyen de ponts et ponceaux maçonnés et busés, tels le pont du "Mouton Engagé" ou celui du "Mouton-Paresseux". Elle aboutit au milieu des trois quartiers où se trouvent le magasin général et un abri pour les roulottes".



Et voilà fin de la visite du bagne des Annamites de la crique-Anguille, l'un des trois centres spéciaux de Guyane avec celui de Saut-Tigre à Petit Saut (voir l'article Petit Saut) et de la Forestière à Apatou sur le Maroni que nous explorerons un jour prochain.



dimanche 10 novembre 2019

Le zoo de Guyane, Montsinéry, Tonnegrande et le sentier des Annamites

Pour sortir de Cayenne par la route il n'y a pas trente six solutions, soit la RN1 vers Kourou, St Laurent et le Suriname soit la RN2 vers Régina, St Georges et le Brésil. Cependant il est possible au-delà de la capitale de relier ces 2 voies principales et ainsi faire une boucle d'une centaine de kilomètres, c'est ce que nous avons décidé de faire le weekend dernier.

Nous prenons donc direction St Laurent, franchissons le pont du Larivot sur la rivière de Cayenne pour rejoindre le PK 25,5 juste avant Macouria et prendre à gauche la CD5 vers Montsinéry et Tonnegrande. Cette route porte aussi le nom de route du Galion.

Notre première halte va se faire au niveau du zoo qui est également un centre de soins de la faune sauvage. La visite va prendre 2 heures et va nous permettre d'apercevoir de nombreuses espèces qu'il sera très difficile d'observer dans leur milieu naturel. Le jaguar par exemple se laisse ici admirer comme beaucoup de serpents ou de rapaces. Je fais peu de photos, d'une part, parce que les cages et autres barrières rendent parfois difficiles les prises de vue, et, d'autre part, parce que j'espère retrouver la plupart de ces animaux en toute liberté.
La visite reste tout de même très intéressante et le parcours en forme de circuit facilite l'observation. Beaucoup de passages sont à l'ombre de grands arbres et il y a même de très nombreux carbets installés tout au long du chemin qui procurent un abri aussi bien de la morsure du soleil que du fracas d'une pluie tropicale.
Nous arrivons trop tard pour le nourrissage du jaguar mais pas des tapirs. Ces animaux placides ne bronchent même pas lorsqu'ils sont littéralement assaillis par une dizaine de singes qui viennent sous leur nez chiper fruits et légumes. Tous ces singes sont en liberté et ont bien compris l'intérêt de rester dans les parages du zoo.


Le parcours comprend aussi un passage en hauteur que nous franchissons sur des ponts de singes métalliques. En cette période l'environnement est plutôt sec et nous reviendrons donc en saison des pluies ce qui devrait modifier profondément le décor.
Tamarin empereur barbu

Agouti
En fin de visite se trouve la zone des rapaces et des aras. Les soigneurs ne sont pas loin car l'heure du repas approche et c'est un concert de cris qui nous accueillent mais un animal semble indifférent, c'est la harpie féroce qui reste stoïque au milieu de toute cette agitation. Attention à ne pas se méprendre, le rapace considéré comme l'un des plus grands et plus puissants au monde n'hésite pas à s'attaquer à des singes.

Ibis rouges
Après plus de 2 heures de flânerie, nous poursuivons notre périple vers le sud et atteignons le petit village de Montsinéry situé sur le bord de la rivière du même nom. Nous y cherchons de quoi nous restaurer et finissons au restaurant "le Montsinéry" seul établissement ouvert le dimanche. Pour information, il s'agit d'une commune formée avec un autre village, celui de Tonnegrande, situé à 20 km, l'ensemble comptant 2500 habitants. En clair on en fait vite le tour mais c'est néanmoins le point de départ en pirogue pour des carbets en forêt et l'emplacement d'une zone de décollage d'ULM équipés de patins d'hydravion.


Inscrite à l'inventaire des monuments historiques, la petite église de Montsinéry possède un clocher en brique et son autel est composé de tous les bois précieux de Guyane. 
Quand à celle de Tonnegrande, que nous rejoignons ensuite, elle est entièrement en bois et son clocher domine la rivière du même nom également. Sa construction a débuté en 1862.
Pour finir cette journée, rien ne vaut une petite randonnée à l'ombre de la forêt. Nous continuons donc notre boucle pour atteindre le point de départ du sentier des Annamites, du nom d'un ancien bagne ouvert en 1930. Il fera l'objet d'un article particulier. Ce sentier fait 4 km en aller-retour et permet, en passant par les vestiges du bagne, de rejoindre une crique et un lieu de pique-nique. En ce qui nous concerne c'est la partie aquatique que nous convoitons car un bon bain serait le bienvenu après une telle journée ensoleillée et chaude.


Le sentier est facile et il est impossible de se perdre. En saison humide, le cheminement doit être un peu plus compliqué car il y a de nombreux passages faits de rondins disposés au sol. Nous y voilà, des tables sont déjà occupées mais peu importe, c'est la crique qui nous attire. Et hop un bon bain puis le chemin du retour. Nous allons croiser de très nombreux randonneurs et en arrivant au parking, il y a effectivement plein de véhicules, environ une quarantaine alors que nous étions 4 à notre arrivée. C'est bon à savoir, il vaut mieux venir en semaine que le weekend si on veut de la tranquillité.


Encore une dizaine de kilomètres vers le sud et nous croisons la RN2 qui va nous ramener vers Cayenne après une journée bien remplie.








vendredi 1 novembre 2019

Le lac de Petit Saut - Dernière journée

Cette deuxième nuit au cœur de la forêt amazonienne s'est parfaitement déroulée et j'apprécie vraiment ces instants dans le hamac sous le couvert d'une simple bâche. Pour cette dernière journée, Ronan nous a prévu une ballade en pirogue et une petite randonnée à l'ombre des grands arbres. Les oiseaux sont omniprésents et ce matin enfin un mammifère à l'horizon. Il s'agit d'une famille de cabiaïs qui détalent à notre approche. On a le temps cependant de les observer avant qu'ils ne se jettent à l'eau pour disparaître ensuite dans l’entrelacs des racines et des plantes qui bordent la rive. En fait de mammifère, c'est le plus gros rongeur au monde appelé aussi capybara. Encore une belle rencontre.
 

Après cette expérience, nous ne verrons plus que des oiseaux mais peu importe chaque instant passé sur le lac est source de bien-être et l'espérance de découvrir un nouvel animal nous maintient en même temps dans un état d'excitation et de concentration. Et que dire du reflet de tous ces arbres morts ou des rives !

Encore un passage de toucans mais d'une autre espèce, ils ont le bec tracé de bleu. De nouveau un beau spécimen de la nature.
Passage de fourmis
Maintenant nous accostons pour une petite promenade forestière pour nous retrouver au plus proche de cette végétation toujours aussi luxuriante. Traditionnelle autoroute à fourmis qui inlassablement transportent des centaines de morceaux de plantes fraîchement découpées pour alimenter une colonie dont on ne peut imaginer un seul instant le nombre de membres.


Nous progressons tranquillement sur un layon faiblement identifié mais la densité de la forêt est faible et Ronan nous fait aussi "couper" à travers pour admirer au plus près certaines espèces, ici un système racinaire en forme d'échasses ou bien encore cet arbre à encens dont la sève brûle très facilement éloignant ainsi les moustiques. Pour ceux qui nous suivent cela ne vous rappelle rien ? L'okoumé gabonais bien sûr !
Arbre à encens


Il est temps de repartir vers notre campement pour profiter d'un dernier moment de convivialité autour de notre poisson boucané mais auparavant rien ne vaut un bon bain dans une crique à l'eau claire. En se frottant avec un petit morceau de savon de Marseille, le seul "autorisé" par toutes les agences de voyages, on se sent immédiatement propre et prêt à repartir pour d'autres aventures, même si on se retrouve couvert de sueur en moins de 5 minutes à cause de l'humidité ambiante.




Le bord d'une crique est aussi souvent l'occasion d'apercevoir des polissoirs. Il s'agit de marques d'usure liées à la fabrication d'outils par les sociétés amérindiennes qui connaissaient parfaitement les différents types de roche. Leurs formes en fuseaux, ovalaires ou circulaires correspondent par ailleurs à la nature des objets qu'ils souhaitaient élaborer comme un bijoux ou une hache par exemple. Aujourd'hui il existe de nombreux sites en Guyane qui permettent d'observer ces traces d'une civilisation que l'on doit protéger pour qu'elle ne disparaisse pas.


Dernier repas au campement fait d'un Aïmara boucané absolument délicieux puis rangement des affaires, nettoyage du carbet et chargement des sacs à bord de la pirogue pour un retour à la civilisation dans 3 heures environ.




La pluie nous surprend sur le trajet retour mais peu importe car nous repartons avec de nouveaux souvenirs et plein de belles images dans la tête. Vivement nos prochaines sorties naturalistes.