dimanche 11 octobre 2020

Les journées du patrimoine - Sons et lumières au fort Diamant

A l'occasion des journées européennes du patrimoine, Cayenne a ouvert ses portes et nous avons pu visiter le musée Franconie (articles précédents) et aussi 3 autres lieux, le pavillon Ho-Ten-You, la maison de Mme Payé et le musée des cultures guyanaises (articles à venir).

Mais pour l'instant une petite vidéo car il y a aussi eu un spectacle Sons et Lumières qui a illuminé les murs du Fort Diamant, petite fortification des années 1840 qui domine l'entrée du fleuve Mahury.



samedi 10 octobre 2020

Le musée Franconie - dernière partie

La visite arrive bientôt à son terme et 4 thèmes restent à explorer. Un peu d'histoire d'or bien sûr car c'est une partie incontournable de la Guyane. Une maquette nous accueille et nous présente la vue 3D d'un chantier aurifère. Des tableaux nous permettent aussi de mieux comprendre les conditions de travail extrêmement difficiles. 


Le Sluice dont il est question sur la photo suivante correspond à une rampe de lavage sur laquelle on fait passer les alluvions aurifères.
Quand au placer, que l'on prononce "placère", c'est simplement une zone concentrée en or qui fera l'objet d'une recherche de minerai. Leurs noms peuvent être surprenants comme Adieu vat, Temps perdu, Délices, Pas trop tôt ou Patience.

Le musée dispose aussi bien sûr de sa collection de minéraux



Sans oublier une histoire de l'art local et notamment amérindien avec celle belle représentation d'une hutte décorée par des motifs colorés de l'art Tembé.


Cette vitrine permet également d'apprécier quelques objets typiques comme en haut à gauche un ciel de case. C'est un véritable art issu de la culture des Wayanas. Appelé maluwana, il est formé à partir d'une rondelle de bois tirée d'un contrefort de fromager. Pouvant faire plus d'un mètre de diamètre il est noirci à la suie puis décoré avec des motifs issus d'un bestiaire mythique comme le tulupele, monstre mi-chenille, mi-jaguar. On a aussi souvent vu le poisson, le crapaud, la poule, le tamanoir et la tortue. Accroché au sommet du carbet, à l'intérieur, ce bel objet est doué d'un pouvoir magique et est un élément protecteur.


Dernier sujet pour nous, mais il y en a d'autres encore dans le cabinet de curiosités, les insectes. Pas de musée d'histoire naturelle sans insectes. L'homme mis à l'honneur est le père Yves Barbotin qui arriva en Guyane en 1935 pour y rester actif pendant 54 ans. Sa vie de missionnaire fut bien sûr intense et son activité de botaniste et d'entomologiste a revêtu un aspect très important. C'est grâce à lui si nous pouvons partager avec vous une exceptionnelle collection de papillons et de coléoptères.








Pour conclure cette belle visite, je vous présente à droite la guêpe Pepsis qui parait-il à la piqure douloureuse classée n° 2. Avez-vous vu sa taille par rapport à la mygale ? Elle n'a quasiment pas de prédateurs et même la mygale va lui servir de lieu de ponte pour ces larves, une fois qu'elle l'aura paralysée bien sûr. Oups !



Voilà terminée cette très belle visite du musée Franconie à Cayenne qu'il faut absolument voir si vous passez par là. Retour vers le passé garanti !

Vue du bar des palmistes depuis le 1° étage du musée


Le musée Franconie - 2° partie

Poursuivons donc notre visite du musée Franconie. Après la très belle exposition des tableaux du peintre bagnard Francis Lagrange dit Flag, repartons de l'entrée principale et commençons la découverte de ce véritable cabinet de curiosités. 

 

Cabinet de curiosités est tout à fait le nom approprié pour ce musée car selon la définition usuelle il s'agit d'un lieu où sont exposés des objets hétéroclites, inédits et insolites. On n'est pas déçu !

Alors entrons dans le vif du sujet avec la collection suivante de bocaux, âme sensible s'abstenir. Bien évidemment les reptiles y trouvent toute leur place et je vous laisse apprécier les photos non pas au niveau de leur qualité car entre lumières changeantes et nombreuses vitrines pas facile de capter l'objet mais pour l'exotisme qu'elles apportent.

Un crapaud. Croaaaa !


Un porcelet !

Passons maintenant aux animaux empaillés qui représentent une grande partie de ce musée très original. Première pose devant la star des fleuves guyanais, le carnivore Aïmara. Et juste avant, au niveau de l'entrée il y a cet énorme caïman noir qui nous souhaite la bienvenue !



Les oiseaux occupent un grand espace et même si les décors peuvent paraître parfois désuets, il faut savoir apprécier et remarquer le travail exceptionnel qui a été fait pour tout d'abord empailler de si petits animaux puis les mettre en scène.





Ce poisson globe est très impressionnant et on imagine bien le nombre d'heures passé à sa réalisation.

Quant aux mammifères une grande vitrine leur est consacrée et le cabiai ou le paresseux semblent plus vrai que nature, enfin presque...


Dans un coin du musée se trouve cet étrange objet. De quoi peut-il bien s'agir ? Et bien c'est un morceau du tronc d'un arbre abattu en 1955 et plus précisément celui d'un palmier qui se trouvait sur la place des palmistes à 2 pas d'ici. Il était devenu dangereux car l'un des jumeaux menaçait de tomber.



Et un cabinet de curiosités n'en serait pas un sans son armoire à pharmacie. Je vous laisse apprécier les 4 bocaux présentés en dessous. On y découvre notamment que le manioc permet de produire le couac qui est toujours un produit phare de nos jours en Guyane. C'est de la semoule que l'on accompagne volontiers de sardines à l'huile ou de sauce chien. Nous avons testé, c'est très consistant et cela tient au corps, idéal pour les longues sorties en forêt ! Quand à la sauce chien, pas de panique, Médor n'est pas passé à la casserole, il s'agit d'une des bases de la cuisine antillaise, c'est une sorte de vinaigrette formée de cive, persil, piment végétarien, ail, oignon, citron vert et huile. Quand à son appellation, elle est tirée du nom du couteau utilisé par tous les antillais depuis 100 ans, le couteau-chien à cause de son logo dessiné sur la lame en inox.




Le fameux logo du couteau Chien


A très bientôt pour la troisième et dernière partie de la visite du musée Franconie.





mercredi 7 octobre 2020

Le musée Franconie - 1° partie

A l'occasion de la journée du patrimoine nous avons découvert le musée Alexandre-Franconie à Cayenne. Inauguré en 1901 sous le nom de musée local créé le 18 septembre 1901 par décision du Gouverneur Émile Merwart (1869-1960), le musée est installé dans la demeure des Franconie, grande famille de négociants, non loin de l'hôtel de ville et quasiment en face du bar des palmistes.

Le musée regroupe des collections dans les domaines de l'histoire naturelle (faune, flore de Guyane), de l'archéologie, de l'ethnologie et de l'histoire locale. L'accumulation des objets dans les salles lui donne un caractère de cabinet de curiosités mais ce sera pour la 2° partie. Aujourd'hui je vais vous montrer la très belle exposition de tableaux du peintre "bagnard" Francis Lagrange, dit Flag.


C’est depuis l’île de Ré, située au large de La Rochelle, que les bagnards sont regroupés avant leur départ vers les bagnes de Guyane. Durant ce dernier séjour en France métropolitaine, les condamnés sont « nourris pour le voyage » et vaccinés contre la typhoïde et la variole. Le 17 février 1931, Lagrange embarque sur La Martinière, direction Saint-Jean-du-Maroni. Il va passer de bagne en bagne et s'adonne aux croquis et dessins.


Libéré de la transportation en juillet 1942, Lagrange peut quitter les îles mais pas la Guyane. Il redevient un relégué, avec une obligation de résidence à perpétuité sur le territoire pénitentiaire du Maroni. 

Les bagnes de Guyane sont progressivement fermés à partir de 1944 et les survivants des privations de la Seconde Guerre mondiale, très souvent amnistiés, sont rapatriés par l’Armée du Salut de 1946 à 1953. Lagrange va faire le choix, avec quelques centaines d’autres anciens bagnards, de rester en Guyane et c'est à partir de cette période qu'il peint ses tableaux les plus célèbres, des scènes de la vie du bagne.



La scène ci-dessous s'intitule "halage des grumes à la bricole". Nous sommes dans le langage marine pour une appellation de halage à col d'homme. Cette technique était utilisée le long des canaux pour tirer les péniches. Les mariniers s'équipaient alors de "las" ou de "bricoles" attachées à la corde de halage. Ici c'est pour tirer des troncs d'arbres.



Encore un terme de marine pour  la peinture suivante. Il s'agit de la manille, une pièce en acier forgé constituée d'un étrier, dont la forme peut être variable. Elle sert à relier, généralement de manière provisoire, un cordage ou une chaîne mais ici il s'agit de bloquer les pieds du bagnard.


Le camp Godebert était un chantier forestier et un camp disciplinaire situé entre Saint-Laurent-du-Maroni et Charvein, réservé aux "INCOS", aux « incorrigibles ». Il fut en service de 1909 à 1938.

Petit rappel sur les catégories de bagnards. Le "déporté" politique bien sûr pour se "débarrasser" du mal-pensant. Puis arrivèrent les "transportés", des condamnés aux travaux forcés pour une durée de cinq ans minimum et astreints de plus au doublage, à leur libération, ils devaient passer dans la colonie un temps au moins équivalent à celui de leur peine ; si celle-ci était égale ou supérieure à huit ans, l'assignation à résidence en Guyane était définitive. Et enfin, comme ci-dessous, les relégués qui étaient condamnés pour multi-récidivisme. Surnommés « pieds de biche » ils sont la dernière catégorie du bagne. En pouvant effectuer des travaux moins contraignants le relégué endosse un stigmate qui le poursuit durant toute sa trajectoire au bagne. Dans l’argot du bagne, le pied de biche signifie mendiant. Rien à ajouter !


La guillotine était présente sur place en Guyane.



Alors pourquoi ne pas tenter l'évasion...